Jeudi 13 septembre, la 17e chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris a condamné le préfet d', Paul Girot de Langlade à 2 000 euros d'amende pour provocation à la discrimination raciale.

A l'origine de la plainte, le MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples) se félicite de cette condamnation qui sanctionne des propos que le préfet avait tenus à propos des gens du voyage : "Il y a trop de gens du voyage en . On a été laxistes pendant trop longtemps. Chacun sait que, quand ils arrivent quelque part, il y a de la délinquance" avait déclaré Paul Girot de Langlade dans une interview publiée dans la Nouvelle République du 23 novembre 2006.

Mais la plainte du MRAP a fait une victime collatérale : Olivier Saint-Cricq, directeur de la Nouvelle République, a été relaxé de l'accusation de provocation à la discrimination raciale mais condamné à 1 000 euros d'amende avec sursis pour diffamation. Il devra en outre verser 1 euro de dommages et intérêts au MRAP.

Olivier Saint-Cricq n'était pas poursuivi en sa qualité de directeur du journal mais en tant que responsable légal du blog de la rédaction de la NR. En effet, afin de pouvoir porter l'affaire devant la 17e chambre correctionnelle plutôt que dans un prétoire tourangeau, l'association avait décidé de poursuivre le blog.
Et la plainte du MRAP ne visait pas seulement les propos du préfet mais citait également les commentaires déposés sur le blog. "Ils illustrent parfaitement le déferlement de haine provoqué par les déclarations du préfet d'" m'avait expliqué en avril dernier Me Pierre Mairat, avocat de l'association.

En visant directement le responsable légal d'un blog en raison de commentaires déposés sur ce blog, le MRAP utilise à merveille une faille de la LCEN mais prend le risque de remettre gravement en cause la liberté d'expression et l'espace de débat ouvert par les blogs.

Suffira-t-il demain de spammer un blog, d'y déposer des commentaires contraires à la loi et de poursuivre ensuite le blog en raison de ces commentaires, pour obtenir sa condamnation ?

Devrons-nous demain, pour éviter de tels problèmes, modérer a priori tous les commentaires sur nos blogs, au risque de limiter l'interaction et les débats d'idées qui pouvaient exister sur les blogs ?

Rédigée avant l'émergence des blogs, la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), distingue les responsabilités de trois types d'acteurs de l'internet : le Fournisseur d'Accès à Internet, l'hébergeur et l'éditeur.

Mais le blogueur n'est-il pas tout à la fois éditeur des billets qu'il publie et hébergeur des commentaires de ses lecteurs ? La loi n'en dit rien, laissant le blogueur dans un flou que, même l'avocat Eric Barbry ne parvient pas totalement à décrypter.

Et de toute évidence, en décidant de poursuivre le responsable légal d'un blog pour des commentaires hébergés sur son blog, sans avoir pris au préalable le soin de lui demander le retrait de ces commentaires, le MRAP fait peser un véritable danger sur l'ensemble des blogs.

Il n'y a plus qu'à espérer que les législateur veuille bien clarifier cette situation pour garantir la liberté d'expression et limiter la responsabilité du blogueur sur les commentaires qu'il héberge.





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